Design culinaire : le palet Yin Yang

Pour le MOOC design culinaire de l’Ecole Ferrandi, que je suis actuellement, il fallait travailler autour du chocolat. La forme était totalement libre mais devait être en relation avec les spécificités du ou des chocolats choisis.

La première étape consistait donc à goûter plusieurs chocolats et à en faire l’analyse organoleptique. Nous avons donc goûté….. une quinzaine de chocolats noirs……….

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(sans compter les pastilles que j’avais en stock, celles que j’ai encore acheté le lendemain…)

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Je suis allée acheter des plaques, en me renseignant pour savoir si ça existait en pastilles, pour pâtisser. Je suis allée chez G.Detou (Valrhona, Du Barry, Weiss…), puis à Lafayette Gourmet (Bonnat, Marou, Lindt, et j’ai acheté là-bas aussi une plaque de J.P.Hévin et une de Michel Cluizel), puis je me suis arrêtée dans une boutique La Maison du Chocolat, et enfin je suis allée chez Patrick Roger, qui me rendait très curieuse.

Précisons que je ne suis pas du tout une fine connaisseuse du chocolat noir ! A priori, si je dois choisir, je préfère plutôt un chocolat au lait ! Et puis si j’achète du chocolat, c’est pour pâtisser, j’achète rarement une plaque à déguster comme ça. Mais justement, c’était l’occasion ou jamais ! Jamais je n’achète une plaque de chocolat noir, donc achetons-en plein pour l’occasion, pour pouvoir comparer le plus largement possible ! (vous trouvez que ma logique est bizarre ? Oui, je m’en doute un peu… mon porte-monnaie m’a fait la même réflexion…)

Une indigestion plus tard, voici le travail que j’ai réalisé pour le MOOC design culinaire :

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Les palets Yin Yang, à déguster en amoureux…

 

C’est quoi, pour qui, pourquoi ?

Pour moi, le chocolat est l’ingrédient sensuel par excellence. C’est autour de cette idée de sensualité (voire de sexualité, dixit M. Brétillot) que j’ai voulu travailler.
 
La sensualité ne prend toute sa dimension que si elle est partagée, ce qui m’a amenée à réfléchir sur l’usage de cette gourmandise. C’est une gourmandise à partager à deux, en couple. Une gourmandise éveillant la sensualité par sa forme et par son goût, susceptible d’être le support de jeux sensuels : tu goûtes ce morceau, je goûte l’autre, tu me fais goûter le tien, je te fais goûter le mien, et, pourquoi pas, embrassons-nous pour mêler les saveurs…
Je voulais donc un objet unique, mais avec 2 parties distinctes, avec suffisamment de matière pour provoquer ces jeux, et suffisamment petit pour se savourer en une seule séance de dégustation, pour faire de ce moment un moment rare, particulier.
A la forme double devait correspondre une dualité des goûts, avec l’utilisation de 2 chocolats différents.
 
La forme ronde du palet et le dessin du yin et du yang se sont imposés comme symbole parfait de l’harmonie des contraires, de la fusion d’un couple, l’un devenant l’autre tout en restant soi.
Ce dessin permet également la présence des 2 chocolats dans les 2 parties, en proportions différentes.
 

Pourquoi ces chocolats ?

J’ai donc travaillé sur la nature de ces 2 chocolats en les cherchant par paires. Les deux se doivent d’avoir une forte personnalité pour que l’un des deux ne prédomine pas. Ils doivent aussi être de goûts suffisamment distincts pour que le contraste soit sensible en bouche. Enfin, ils doivent chacun inspirer la sensualité
(J’étais partie sur l’idée d’un chocolat « plutôt féminin » et d’un autre « plutôt masculin », mais finalement j’ai trouvé ça peu subtil, et très subjectif. Les chocolats que j’ai choisis sont par ailleurs trop complexes pour se ranger dans ces cases.)
 
Je me suis amusée à en faire 3 versions, qui sont autant d’axes de recherche :
 

1/   2 chocolats noirs :

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On reste dans le chocolat noir, et il s’agit donc d’en apprécier l’accord et les différences. Pour ce 1er essai j’ai choisi 2 chocolats de Patrick Roger : 
  • Equateur 80%Fort, puissant, dense. Grande profondeur de goût : l’attaque, dès qu’on le met dans la bouche, évoque le cigare, un fumoir, une atmosphère sombre et feutrée. La note en fin de bouche est plutôt fleurie (lilas, jasmin)
  • Pérou 68 % : Sa robe est plus claire. Il est plus rond, plus frais, plus doux que l’Equateur. Notes de café et de vanille. Il évoque un espace peuplé, ouvert, coloré.
Les deux ont une grande longueur en bouche.
 

2/   Le chocolat Dulcey de Valrhona et un chocolat noir :

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A la recherche d’un contraste complet, contraste de couleurs et contraste gustatif avec 2 chocolats de natures différentes.
  • Le Dulcey de Valrhona (chocolat blanc caramélisé) : Tendre au toucher, presque moelleux. Goût sucré, goût de caramel très prononcé, qui évoque le plaisir. On n’est plus dans le domaine de la complexité des goûts, mais dans le pur plaisir gustatif, immédiat et volatil.
  • Equateur 76 % de Du Barry : Profond, suave et chaud. Il évoque très nettement la chaleur. Goût torréfié. Je l’ai choisi pour le contraste qu’il offre avec le Dulcey : l’un profond et chaud, l’autre ludique et fantasque.
 

3/   Chocolats et ingrédients ajoutés :

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Version vraiment plus ludique : un contraste visuel plus fort avec le noir et le blanc, des goûts moins délicats du point de vue chocolat mais avec des saveurs ajoutées.
Pour ce premier, j’ai choisi piment et gingembre
  • Valrhona Ivoire + piment d’Espelette
  • Grand Noir de Weiss (57%) + gingembre confit
Il y a un fort contraste de saveurs (chocolat blanc/noir, piment/gingembre), mais on est surtout clairement dans le domaine du jeu sensuel à deux.
 

Création d’un moule :

 
J’ai dû réaliser un moule en silicone alimentaire, et c’était pour moi une grande première ! En voici les étapes :
 
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  • Fabrication d’un premier modèle en plastiline (sorte de pâte à modeler), le plus précis possible et le plus lisse possible. Diamètre : 7 cm (image en haut à gauche)
  • Fabrication d’un contre-moule en plâtre
    Préparer le modèle en plastiline en l’entourant d’un emporte-pièce rond plus large, fixé à la planche par un boudin de plastiline, afin que le cercle ne bouge pas et que le liquide ne s’échappe pas. 
    Préparer un plâtre liquide (1 poids de poudre pour 1 poids d’eau) et le couler.
    Laisser sécher 12 heures, puis ôter le premier modèle en plastiline.
  • Fabrication d’un second modèle en plâtre. Pour le séparer du contre-moule (lui aussi en plâtre), badigeonner à l’aide d’un pinceau le contre-moule avec du savon noir dilué dans de l’eau chaude, puis refroidi. Sécher au sèche-cheveux, puis remettre du savon noir 3 fois, en séchant entre les couches. (image en haut à droite)
    Verser du plâtre liquide dans le contre-moule, laisser sécher au moins 12 heures.
    Casser le contre-moule en petits morceaux, en donnant des petits coups au ciseau à bois et au marteau, délicatement pour ne pas casser le second modèle. Il finit par se détacher du contre-moule.
  • Bouche-pore sur le second modèle : passer du lait sur la forme et sécher au sèche-cheveux. Recommencer l’opération 3 fois (voire plus, ça n’a pas suffi)
  • Fabrication du moule en silicone alimentaire :
    Préparer le modèle en plâtre en l’entourant d’un emporte-pièce rond plus large, fixé à la planche par un boudin de plastiline, afin que le cercle ne bouge pas et que le liquide ne s’échappe pas. (image en bas à gauche)
    Mélanger la base de silicone alimentaire avec son catalyseur (proportions 10 pour 1), bien mélanger jusqu’à obtenir une couleur homogène.
    Passer un peu de ce mélange au pinceau sur le modèle en plâtre pour éviter les bulles d’air.
    Couler ensuite le reste du mélange dans le cercle. Laisser sécher au minimum 16 heures.
    Libérer ensuite le moule en le tordant délicatement. (image en bas à droite, fini)

(il semble que le silicone alimentaire ne supporte pas les modèles contenant du soufre. Le vendeur de Rougier & Plé m’a mis en garde là-dessus, me disant que mon modèle en plastiline + le silicone alimentaire = une cata, et c’est pourquoi j’ai dû passer par un contre-moule + par un modèle en plâtre. Il y a sans doute moyen de se faciliter la tâche en choisissant un autre matériau pour le modèle de base….)

Note technique sur mes essais :
Mes essais manquent de brillance. Il semble que ce soit moins un problème de tempérage des chocolats que de moule : 
le moule de silicone alimentaire que j’ai fabriqué pour ces essais  aurait dû être parfaitement lisse pour que le résultat soit brillant. Or (pour des questions de bouche-pores) la surface du moule n’est pas parfaitement lisse, et du coup, les chocolats non plus.)
 

Fabrication des chocolats :

 
(Le plus dur, c’était le moule !) Pour chaque palet, tempérer le 1er chocolat. Le verser dans la moitié du symbole Yin Yang et dans le cercle opposé. Il vaut mieux déborder un peu et ôter le surplus quand le chocolat a commencé à cristalliser, plutôt que l’inverse.
Laisser sécher pendant le tempérage du second chocolat. Verser celui-ci dans la 2ème moitié du symbole et sur toute la surface du palet pour l’égaliser à la spatule.
Laisser cristalliser, puis démouler.
 
 

Conclusion :

 
Qu’en pensez-vous ? Et a priori, vous préférez lequel ? :-)  N’hésitez pas à me donner votre avis dans les commentaires !
De mon côté, j’ai trouvé ce travail extrêmement enrichissant. En terme de recherche de design culinaire bien sûr, mais aussi, en plus, grâce à cette dégustation/comparaison de chocolats noirs différents, et à l’analyse qu’on devait en faire. Je trouve que ce genre de comparaisons nous font avancer beaucoup plus loin, les papilles apprennent, se forment, s’affinent (et c’est là qu’on devient très chiant et très exigeant… 😉  ) .
Bref, sans forcément vous lancer dans une telle recherche, je vous invite ardemment à faire la dégustation, en famille, en couple ou avec des amis, à acheter quelques plaques et à les goûter ensemble. Pour le partage… et pour le goût !  :-)
 
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3 comments

  1. LZA

    Voilà donc un bon article, bien passionnant. J’ai beaucoup aimé et n’hésiterai pas à le recommander, c’est pas mal du tout ! Elsa Mondriet

  2. Emmanuelle

    Bravo ! Quel travail et quelle réflexion !!! Très envie de mordre dans vos palets, mais pas du tout le courage de vous imiter…. Mille mercis !!!

    • Lucia
      Author

      Ooh, désolée Emmanuelle, je ne vois votre commentaire qu’aujourd’hui ! Merci pour vos félicitations qui me touchent beaucoup et qui me donneraient presque envie de recommencer… Mais bon, là je suis comme vous, je n’ai plus trop le courage !! 😀

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